Le siège de Géant

Le siège de Géant
Une merveille des monts Kabyè

samedi 30 mai 2009

Arrêt sur image: Keep on trying, camarade bique!


A Kétao, j'ai vu cette bique, les pattes arrières sur une pierre, les pattes avant sur un toit, essayant de viander quelques feuilles d'un manguier.

Des espaces où la vilaine main de l'homme n'a pas encore tout saccagé (suite)

Ici de petites plantes inconnues avec des fruits tout blancs. Eh ben, je n'ai pas pris le risque d'en goûter.
Des arbustes qui offrent une fraîcheur reposante.
Les fleurs blanches d'herbes sauvages dans un champ non encore labouré. En arrière plan les trois baobabs séculaires.
L'un des baobabs
Deux pierres complices.

Des espaces où la vilaine main de l'homme n'a pas encore tout saccagé

De temps en temps pour échapper à la dépression qui nous guette au quotidien dans notre boulot, des collègues Educateurs et moi consacrons une journée par mois pour parler de tout et de rien, rigoler ou effectuons des sorties vers des villages voisins. Jeudi dernier, on s'est offert une virée dans les montagnes de Lassa (un canton de Kara), sur une colline à Kétao et nous sommes même allés jusqu'à la frontière Togo - Bénin. Voici quelques photos de cette ballade bienfaisante qui éloigne un moment de la pression boulotique. N'accordez aucune attention à ce mot. Car il faut souvent faire des enfants, (bâtards ou baptisés par l'Académie, qu'importe) à cette langue française. Alors je lui en colle un de bâtard ce matin, ne l'ayant trouvé dans aucun dictionnaire.
J'ai retrouvé des arbustes de mon enfance. (ici le Gardenia Spp)

Des baobabs sur la route de Landa (un autre canton de Kara) taisent difficilement leur âge

C'est agréable d'admirer toutes ces collines qui cachent des habitations rustiques.

samedi 23 mai 2009

C'est un cri que nous devons entendre


Si nous pouvions écouter le cri de cette bouche ouverte pour toute la violence que l’homme inflige à la nature, il est bien des angoisses de serre et de soucis de réchauffement qu’on s’éviterait. Si nous pouvions écouter les gémissements de cette bouche violentée par les mains humaines, le désert ne serait plus une frayeur, la fonte des glaciers, une angoisse. Mais l'homme n'en fait qu'à sa tête, s'il se trouve qu'elle lui sert encore à quelque réflexion.

vendredi 22 mai 2009

La nature est un phare: soyons en ses gardiens.


Regarder les arbres, les grands et les petits, regarder les herbes, les vertes et les sèches, s’extasier devant les fleurs, regarder les insectes, les plus ordinaires et les plus curieux…, regarder cette « horloge », selon le mot de Voltaire et ne pas s’incliner de respect pour son mystère et sa sacralité, relève d’une petitesse d’esprit chez l’homme.

Secouer les mémoires pour rendre témoignage à nos pères esclaves


Après la lecture d'Esclaves de Kangni Alem, il m'est venu à l'idée de renvoyer les lecteurs de mon blog sur l'histoire de l'esclavage. Ils doivent par exemple connaître le "Code noir" qui a régi le système esclavagiste pendant plusieurs siècles. Car nous devons commencer "l'apprentissage de la mémoire" (titre d'une pièce de théâtre de Kagni Alem), pas pour quelques actions vandales, mais pour que les mémoires n'oublient pas. Pour que les coeurs et les mémoires ne se disloquent en vainnes colères.

Je voudrais aussi rappeler l'appui que la très sainte église catholique a donné au système esclavagiste. Je renvoie les bloggeurs à ce lien sur le pape Nicolas V qui "le 08 janvier 1454, de son vrai nom Tommaso Parentucceli <1398-1455>, 206ème pape, écrit au souverain du Portugal Alphonse V une bulle papale spéciale l’autorisant à soumettre en esclavage les nègres de Guinée et les païens. Cette position de l’église chrétienne, accompagnée de la légende de Cham que la noble institution diffusait sans s’encombrer de son réel fondement textuel et théologique, trop contente de disposer de nouveaux territoires de croisades, d’évangélisation, ferait autorité balayant les réticences des négriers en herbes et traitants néophytes. La position de l’église catholique par rapport à la Traite négrière n’allait pas être un épiphénomène loin de là, ses encouragements à l’ensauvagement esclavagiste continueraient tout au long de la période négrière, à l’instar de l’activisme doctrinaire de l’éminent théologien français Bellon de Saint Quentin, qui se servait des Saintes Ecritures pour libérer la conscience des traitants qui s’en remettaient à sa science."

Nous ne devons pas, par paresse, par omission ou par négligence, oublier ce que nos parents ont souffert. Rendons-leur ce témoignage de la mémoire.

jeudi 21 mai 2009

Esclaves : le piège de la fiction et de l’histoire avant la porte de non retour !



http://www.blogger.com/post-create.g?blogID=5966128720909516117


Deux nuits durant, j’ai été l’esclave d’Esclaves, le dernier roman de Kangni Alem, paru début mai 2009 aux éditions JC Lattès. Un succulent esclavage porté par une lecture entraînante, interrompue parce que qu’il fallait après tout fermer l’œil et affronter le boulot du lendemain.
La dernière page tournée, il reste dans la mémoire de l’enfant que je n’ai pas cessé d’être – l’enfant en quête d’histoires ou agréables ou horribles ou fantastiques – le souvenir de l’itinéraire d’un personnage qui traverse toute l’histoire : le maître des rituels devenu Miguel, devenu Sule, devenu Sule Djibril. Que d’avatars identitaires !
L’enfant que je n’ai jamais cessé d’être a rangé d’un côté les personnages méchants : Francisco Félix de Souza dit Chacha, son complice Gankpé le chef des armées qui deviendra le roi Guézo, une fois le roi déchu, l’amazone Nansica, la Mamie Ahouna à la « nudité fanée par le temps et les parturitions », et de l’autre les personnages sympathiques, souvent victimes des méchants : le roi et son épouse Sophia qu’on appelle encore Sikadjin, le maître des rituels, devenu Miguel, devenu Sule, devenu Sule Djibril, le vieux Sule à Récife… L’enfant qui n’est pas encore mort en moi, que je berce à mes heures de langueur, s’est souvenu de ce film tiré du roman d’Alex Haley, Roots ; a retrouvé surtout son « cangaçeiro » des jeux de l’enfance qui nous occupaient après chaque film d’action.
Cependant le lecteur cartésien que je suis devenu, analyse. A cause que j’évite que les idées qui me parviennent corrompent mon esprit, je dois procéder par élimination successive et progressive des idées reçues, afin que, enfin de compte, je ne puisse retenir que celles qui, en mon sens et sous l’empire de ma raison, me paraissent inébranlables, inattaquables comme celle si évidente du « je lis, donc je vis », je me résolus à conclure dans Esclaves que les nègres ont contribué dans une large proportion à maintenir et à entretenir ce commerce honteux de chairs d’ébène, mus pour la plupart par des rancœurs tribales, familiales, les chicaneries et l’attrait morbide des bimbeloteries occidentales.
Que ce soit dans la razzia et la vente d’hommes, que ce soit dans les velléités révolutionnaires à Bahia de tous les esclaves, clin d’œil évident au roman Bahia de tous les saints, le nègre a toujours été le malheur du nègre.
Morceau choisi :
« En même temps qu’il pleurait sa condition, l’esclave noir se révélait incapable d’éprouver le besoin d’une solidarité sans faille avec son frère ou sa sœur de race. Il était même prêt à dénoncer à son maître les velléitaires qui voulaient forcer le sort et précipiter la fin de leur servitude, il était prêt à trahir, comme si, au fond, sa condition servile ne lui répugnait pas trop, et que tout compte fait, il préférait de loin l’esclavage au Brésil à sa liberté d’autrefois parmi les gens de sa nation. » (pp 197 -198).
Merci Alem, pour ta dédicace : j’ai lu, et j’ai vu. J’ai vu que :
« Si la traite négrière à saigné l’Afrique, elle a aussi enrichi ses rois. Mais rétorqueront les plus choqués par une telle affirmation, mettre l’enrichissement des rois complices au même niveau que celui des nations d’Europe et d’Amérique, qui elles ont été radicalement transformées par le pillage de la main d’œuvre noire, c’est seulement faire acte de cynisme de petit raconteur d’histoires ! (…). Les plus forts sont toujours à l’origine de la violation des droits naturels et sont les derniers à avoir en eux le sentiment de justice. Celui qui accuse entre sous le feu de la critique, mais seulement voici la vérité : celui qui accuse a déjà connu le feu : al-mit-him ahal an-när !
« Les Noirs d’aujourd’hui eux-mêmes ne s’entendent pas sur le sujet, préférant se chamailler de l’Afrique aux Antilles : que penser d’un tel clivage ? Quant aux Européens, toujours fidèles à leur bassesse, ils entretiennent encore le mythe outrageant de ceux qui n’ont acheté que parce qu’il y avait des vendeurs. Piètre raisonnement.
« L’esclavage est un outrage, un défi lancé à l’humanité, pourquoi tenter de s’en disculper ! Et s’il y avait une justice à rendre, c’est aux victimes qu’il faudrait la rendre, et non pas à leurs bourreaux. » (p 227 – 228).

Et je comprends pourquoi aussi certains Béninois trouvent que Esclaves est un roman subversif et t’attendent pour faire ta fête. Dis quand ce sera ta fête béninoise et je verrai si je pourrai participer à cette orgie littéraire.
Il m’est resté, la dernière page tournée, une interrogation puérile, une question hypocrite : qui est ce Sylvanus Epiphanio Elpidio, fils de Francisco Olympio, qui deviendra premier président du jeune Etat indépendant de TiBrava ? Si ce n’était qu’une fiction, je serais tenté de faire des rapprochements, parce que des Sylvanus, premier président d’un Togo indépendant, on en connaît ! Mais heureusement, Esclaves n’est pas la page manquante de l’histoire de l’esclavage. C’est un roman, donc une fiction. Et c’est le piège dans lequel il ne faudra pas surtout tombé, le piège que tend l’écrivain : histoire ? fiction ? Datation et imagination se côtoient sans frontière pourtant.
Tout le long de ma lecture, j’ai revécu les émotions qui m’envahissent chaque fois en face de la « Porte du non retour » à Ouidah au Bénin. En 2004, j’avais noté dans mon carnet après avoir traversé cet espace hautement symbolique d’une période noire : « Dans quels pas de quels esclaves, venant de quelles contrées d’Afrique est-ce que je mets mes pas ? Quelles larmes séchées sur ce sable silencieux est-ce que j’écrase avec mes chaussures Nike ? Combien ont fait le chemin que je refais, eux le regard perdu vers cette immensité qui allait les engloutir et jamais les vomir, moi, la raison étourdie, dans mes Nike, ignorant tout ce qui s’est véritablement passé sur ce sable infini vers ces eaux immenses infinies » (Août 2004, Carnet « Mon voyage au Bénin »).
Je me demande encore aujourd’hui ce qui s’est passé sur ces plages silencieuses !

lundi 18 mai 2009

L'affaire du beignet au Château de la Roche Jagu

Depuis le 20 mars 2009, il est apparu dans le domaine de la Roche Jagu, un phénomène bizarre, qui est aujourd'hui connu sous l'appellation de l'affaire dite du beignet. (voir vidéo sur le lien: ww.dailymotion.com/video/x99i0g_les-enchoufflichures_creation
Bonne visite visitez le blog des enchoufflichures pour mieux cerner ce phéno mène.

samedi 16 mai 2009

La soubole

(En mémoire de... pour supprimer "charnier" des dictionnaires)

Au commencement une brise sous la langue
un courant d’air dans la bouche
un tourbillon dans la tête
un typhon dans les biceps
un cyclone échelle six dans le pays
et la boussole détraquée.

Dame lune pleure son sang
sir soleil relooke son sabot
pour un trot plus agile
miss starlette ratatinée a perdu sa chance
un œil mort rue saint Fiacre
un lobe à l’autel
une soutane chez Pilar de Ternera
une jambe en travers la frontière
une malle éventrée
regarde le grand portail tout crocs dehors de l’ambassade de France
une valise sous une pluie de sang sur la rue de l’aéroport
le cachet du visa belge trempé de sang
une tâche de sang cache la photo d’un passeport
une case cap de feu
une cravate pendue à un cou
la tête fait un jogging avenue Charles de Gaule
un lézard la gorge brûlée
sirote l’air incandescent sur un mur lépreux
une fourchette sur un intestin
boulevard du général
et le chien infirme
et la poule charbon
les rues le Yang-Se en crue de sang
le boulevard de la république
la route de Bouyoumba
et la route de Bukavu
un hôpital le grand baobab de l’université
un chirurgien a dû cureter les magasins vides
les bouches crachent des coulées entières de clefs de portées de notes
partition pour un lamento en sol pleureur
pour un ballet macabre un charnier
un nez pétrit dans la merde crue
et la chasse aux faciès
aux balafres aux oreilles percées aux lèvres trouées
au teint anthracite
et la carte d’identité témoin de la bâtardise
établie à charge
un gros intestin sur une table d’hôtel
un arbre renversé l’air innocent de
j’ai quel faciès moi
et les toits des salles de classe magiques
figures de trapéziste suspendues
deux fesses deux jambes
mangées par un waters de nègre sans pot
à ciel ouvert
et la tête du cochon
l’œil surpris dans la gourmandise
et ainsi de suite des etc.
car l’homme a fait énormément de progrès
et peut s’accorder la récréation de la
déraison
et des etc. éblouissants.

vendredi 15 mai 2009

Extraits coup de cœur de Parcours de combattants, Gerry Taama

I
« Ils étaient quatre personnes à avancer dans la nuit sans étoiles. Il y avait trois hommes habillés de façon ordinaire : jeans, T-shirt bariolés, espadrilles. L’un d’eux, sans doute le chef, avait à la main droite une sorte de cimeterre à la lame exagérément recourbée. Les deux autres encadraient Aurore. La fille avait les mains liées et le visage tuméfié, mais elle conservait dans le regard cette défiance qui la rendait inaccessible. Le groupe arriva sous un gros baobab et s’arrêta. Il devait être 4h environ ; quelques coqs chantaient dans le lointain. L’obscurité était totale. L’homme au cimeterre désigna l’arbre et les autres s’exécutèrent. Ils attachèrent la fille grâce à des liens prévus à cet effet et allèrent se mettre une dizaine de mètres plus loin. Le silence de la forêt était troué par le hululement entêté d’un hibou. L’homme au cimeterre fit un geste brusque du bras : un de ses adjoints s’abaissa et actionna une manette dissimulée dans les herbes. Un gros projecteur, dissimulé dans un baobab voisin, s’alluma et noya la scène d’un éclat éblouissant. Aurore ferma instinctivement les yeux. L’homme leva le bras gauche et entreprit une série de pas s’apparentant étrangement à une samba. Les deux acolytes se mirent à battre les mains suivant une cadence donnée par le chef. Aurore ouvrit les yeux pour les refermer aussitôt ; la lumière du projecteur était trop forte.
L’homme au cimeterre se mit carrément à danser, sur un rythme devenu démentiel. Il bondissait, virevoltait sur lui même, se retournait parfois pour encourager ses acolytes, puis repartait sur la piste pour de nouveaux exercices. Il maniait son arme avec une dextérité remarquable. Il la passait rapidement d’une main à l’autre, la lançait parfois en l’air pour la récupérer au haut vol, le tout agrémenté de pirouettes à faire pâlir de jalousie un acrobate de cirque. L’homme s’arrêta brusquement, fit face à ses compères et lança un cri rauque. Les autres crièrent aussi à l’unisson et changèrent la cadence du battement de mains. Celle-ci devint plus rapide. La danse sur la scène s’était muée en une suite de bonds successifs autour du baobab. Avec des allures de triple sauteur, l’homme progressait en suivant des lignes concentriques dont on devinait à peine les contours tenus sous la lumière crue du projecteur. Au troisième tour, comme il se trouvait à un mètre environ de l’arbre, il lança le cimeterre en l’air, le rattrapa sur un bond, et avant que son pied ne touche le sol, l’abattit lourdement sur le cou de sa victime. La tête, tranchée net, se détacha dans un geyser de sang et roula sur l’herbe verte gavée de rosée. L’homme au cimeterre fit un signe de la main à ses camarades qui aussitôt mirent fin à la « musique ». Il avança placidement vers la tête sanguinolente. Mais alors qu’il s’accroupissait pour la saisir par les cheveux, les yeux du faciès s’ouvrirent brusquement, et une voix claire, pleine de rage, troua le silence en disant :
- Jérôme, pourquoi m’as-tu abandonnée ? » (P 104 – 105)



II
« - Et n’oubliez pas d’économiser les batteries. Travaillez le timing, au lieu de mater les gonzesses du village.
Les deux chefs d’équipe s’éloignèrent en gloussant.
Lorsqu’il se retrouva seul, Kirbi ne résista pas à l’envie de sonder une fois encore les cases où se trouvait le soupçon d’un lit. Mais apparemment, les villageois n’avaient pas la tête à batifoler cette nuit-là. Dépité, il éteignit la lunette en souriant : l’homme qui avait inventé cet appareil devait avoir des choses à reprocher à son épouse. » (P 211)

Café-littéraire sur Parcours de combattants, roman Auteur : Gerry Taama Edition : L’Harmattan, Paris 2009



Jérôme du Bercenay, Ba-Yoko et Aurore Bitimuku : trois destins projetés dans un conflit ethnique aux lendemains d’élections présidentielles contestées, dans un Kiiguland, un pays imaginaire de la corne d’Afrique coincé entre Djibouti, l’Ouganda, le Soudan et la mer rouge. Trois destins, tout au long d’une trame faite de rebondissements et de suspens, vont tisser un récit telle une corde à trois fils. Le candidat Mamba ayant contesté les résultats des élections a créé une branche armée ALPO (Armée pour la Libération des Peuples de l’Ouest de son parti le MPED (le Mouvement Patriotique pour l’Eveil Démocratique). Les affrontements avec les forces loyalistes, ont vite fait de dégénérer en conflit ethnique : les Bakufus, l’ethnie du président élu Makélé contre les Mambas, l’ethnie du président malheureux. C’est dans cette atmosphère délétère, dans cette pagaille sanglante que l’ONU envoie une mission de maintien de la paix composée de soldats Bangladais et de soldats Français, dont le lieutenant Jérôme du Bercenay, fils du duc de Bercenay.
Voici campé le cadre de Parcours de combattants, le roman qui a fait l’objet d’un café littéraire le 14 mai 2009 à Kara. Kangni et moi avons joué aux modérateurs, devant des enseignants d’université, des étudiants, des enseignants du secondaire, des élèves et de bien d’autres personnes. Le café littéraire a tourné autour de la connaissance de l’auteur, son arrivée dans le milieu littéraire togolais et ses modèles, autour des personnages, surtout le trio Ba-Yoko, Jérôme et Aurore, réunis dans une relation triangulaire faite d’amitié (Ba-Yoko – Jérôme), d’amour (Jérôme – Aurore) et de haine (Ba-Yoko – Aurore), autour de son écriture, une écriture comme des coups de kalachnikov, rapide et précise, enfin, autour de ses projets immédiats.
Parcours de combattants n’est pas une initiation au métier d’armes, ainsi que le titre peut nous pousser à penser. Il faut ensuite échapper au sens strict du dictionnaire qui définit le « parcours de combattant » (combattant au singulier) comme « un parcours semé d’obstacles (murs, barbelés, échelles de corde, poutres, etc.) que doit accomplir un soldat en armes dans un temps donné » (Le Nouveau Petit Robert 2009). Il faut préciser que ces obstacles sont au nombre de vingt (20) dans l’armée française. Bon, voilà ! Mais le pluriel à « combattants » du titre, ouvre une investigation littéraire plurielle et la lecture qui s’impose tout de suite, présente ce roman comme un hymne à l’amitié et, ainsi que l’a confié l’écrivain lui-même dans une note de lecture publiée sur www.Togocultures.com, Parcours de combattants est une histoire de« fraternité d'armes, qui survit au temps et à l'espace. » Une amitié avec toutes ses ramifications de complicité, de secrets tus, d’ascenseur renvoyé, de disputes, de conciliation, une amitié que rien n’ébranle, qui se déploie au mépris et au détriment des raisons d’Etat. La patriotard Ba viole tous les règlements pénitentiaires et militaires de son pays pour aider son ami Jérôme à sauver son amoureuse Aurore. Jérôme au nom des cette amitié, confie des secrets de sa mission à son ami Ba.
L’amitié et l’amour s’installent dans une relation triangulaire entre Aurore, Ba et Jérôme et l’amitié est au service de l’amour. Le personnage le plus complexe de ce roman se trouve être le lieutenant Ba, un personnage déchiré, tenaillé d’un côté par le remords de la bavure de Tchibaya lorsqu’il a abattu le professeur et la conscience aiguë qu’il a de sauver la fille, convaincu que tant qu’il ne l’aura pas fait, il sera toujours poursuivi par le fantôme du professeur le pourchassant toutes les nuits avec un coupe-coupe, et de l’autre sollicité par l’ami français qui lui est rongé par un amour dévorant pour la même fille.
Le roman pointe aussi l’hypocrisie droit-de-l’hommiste des missions onusiennes de maintien de la paix qui consistent à regarder les peuples s’entretuer sans intervenir. Le Lieutenant du Bercenay a observé d’une colline toute la scène de l’embuscade sans intervenir. Il est descendu après l’assassinat du Pr Bitimuku prélever des indices et c’est contre le règlement qu’il sauve la fille Aurore Bitimuku des griffes d’une foule vengeresse. A quoi sert une mission de maintien de la paix si les casques bleus doivent regarder les peuples se massacrer sans intervenir ?
Si nous posons le postulat que toute lecture est un départ en aventure, alors Parcours de combattants est une île à découvrir, une île située dans un ici et un partout de l’Afrique avec sa senteur fétide de sang, son parfum entêtant de poudre à canon, sa légendaire hospitalité qui contraste avec sa soudaine et inexpliquée barbarie.
Parcours de combattants est de ces thrillers qui poussent à tourner la page suivante, encore et encore, tant qu’on n’est pas allé jusqu’au bout de l’histoire, jusqu’au dénouement.
On pourra lire l’interview de que l’écrivain nous a accordée, publiée sur www.togoforum.com.

lundi 11 mai 2009

Culture, la révolution à faire au Togo.




Lorsqu’on s’amuse à dessiner une carte des manifestations culturelles au Togo, on peut se frotter les mains : il n’y a rien à légender. Quelques manifestations isolées. Le FESTHEF a entre-temps fait la fierté du Togo, puis des chicaneries internes ont sabordé le festival. Les RETHES à Sokodé n’ont pas encore atteint une envergure médiatique internationale. Le seul festival qui ouvre véritablement le Togo au monde entier aujourd’hui est le Festival des Lucioles Bleues, FILBLEU, qui a cette particularité d’apporter le théâtre au spectateur, plutôt que d’attendre que le spectateur vienne au théâtre. Il faut aussi saluer l’effort des centres culturels Adokpo, Denygba, Aréma et autres, tous à Lomé. Evidemment, je ne citerai pas les centres culturels français, américain, islamique et allemand.
Le nord en est exclu.
Le domaine culturel semble n’intéresser personne. Les politiques s’en moquent comme d’un bibelot du tertiaire. Ils dévoient toute la jeunesse dans les préoccupations et manifestations politiques. Le folklore et les célébrations culturelles dans les villages et hameaux ont revêtu la courte jupe politique et se prostituent sans tenir compte ni des saisons ni des coutumes.
En marge des élections miss Togo, d’autres organisations régionales pour désigner les plus belles meufs se tiennent : la plus belle collégienne, la plus belle lycéenne, la plus belle étudiante, miss maman N’DANIDA. D’ici à ce qu’on voie l’élection de la plus belle couturière, de la plus belle coiffeuse ou de la plus belle fille de joie, il n’ya qu’une lubie à franchir. La notion de la culture est tellement rétrécie au Togo qu'elle rabougrit les inspirations. Les lectures spectacles, les spectacles théâtraux, le cinéma, les cafés-littéraires, les spectacles de marionnettes, les déclamations de poèmes, les conférences, etc., tout cela semble inconnu. A quand remontent les dernières salles de cinéma à Kara, à Sokodé ? Existe-t-il encore des salles de cinéma à Lomé ? En lieu et place, ce sont les bars, les débits de vente de boisson locale qui envahissent nos villes et éloignent la jeunesse des bibliothèques et des activités culturelles.
Il y a donc un travail à faire : renverser les intérêts actuels. Les jeunes sont les valets des politiques ; ils sont convaincus par l’exemple que la politique est l’unique voie pour un enrichissement personnel. Il faudra les convaincre du contraire et leur apprendre à mettre la politique et les politiques à leur service. S’ils se désintéressent de la politique, les politiques viendront les chercher. Les jeunes peuvent faire parler d’eux et de leur pays à travers leur engagement pour la chose culturelle. Lorsque Kossi Efoui a gagné le prix Ahmadou Kourouma, on a parlé du Togolais Kossi Efoui. Mais combien savent que le premier ministre a effectué un voyage dans tel ou tel pays ? Lorsque Kangni Alem a publié son roman Esclaves, les presses culturelles ont saisi l’événement et en ont fait une large diffusion. Mais quel est le retentissement international des audiences du chef de l’Etat ou du président de l’Assemblée ? Il est indéniable que la culture est la porte du pays qui s’ouvre sur l’ailleurs pour faire entrer et faire sortir des valeurs positives dans une dynamique d’osmose.
Le domaine culturel est un terrain en friches qu’il faudra labourer. S’il est une observation à souligner, c’est bien celle-ci : les politiques sont des frustrés complexés qui ont besoin de laver leurs tares et leurs médiocrités au détergent politique ; des vides qui ont besoin de nous pour faire leur plein de fierté. Pourquoi alors leur donner cette occasion ? J’ai toujours ce sentiment fort que c’est nous qui donnons à nos présidents et à nos députés, le pouvoir de nous mépriser, de nous maltraiter. Puisqu’en définitive ils ne servent personne. Ils desservent au contraire. La révolution qu’il faut faire au Togo pour changer de cap et amener les hommes politiques de tout bord à réfléchir, c’est bien la révolution culturelle. Dès le primaire, au collège et au lycée, initier des activités culturelles, théâtrales par exemple, plus formatrices que les supposées semaines culturelles qui n’ont rien de culturel. Si nous restons dans leur jeu, le suicide culturel est garanti pour nous tous. Et les hommes politiques n’en ont que faire.
Abandonnons donc la politique aux courtisans et cultivons notre jardin… notre culture. Si nous les oublions, ils se rappelleront notre existence, mais si nous leur courons après, ils continueront d’oublier notre présence.

mercredi 6 mai 2009

"Qand on est triste": un poème de l'oncle sauvé par un neveu mangeur de couli-couli

J’aimerais partager ici une curieuse histoire que j’ai vécue, il y a plus de 20 ans maintenant. J’avais un oncle, Apollinaire Mao, étudiant à Bordeaux en France, décédé en France le 15 octobre 1982. Respect à toi, oncle, où que tu te trouves. J’étais alors en classe de 5ème au CEG Agbandi. Cinq (5) ans plus tard, au lycée de Sotouboua, en classe de 1ère A4, j’achète des beignets d’arachides (couli-couli) au bord de la route et la revendeuse m’emballe soigneusement ma marchandise dans une feuille de papier, format A4. Après que j’ai fini de me régaler de mes beignets, je me suis rendu compte qu’un texte poétique était dactylographié sur la feuille. Je ne me suis pas retenu, j’ai lu le texte pour me rendre compte à la fin que ce texte était signé Apollinaire Mao. Mon oncle paternel.
Comment se fait-il que ce texte, écrit par mon oncle me tombe sous la main de cette façon ? Avait-il un message à me livrer ? Les morts ne sont pas morts, dit-om ! Et pourquoi moi ? Au même moment, je me disais que si je n’avais pas acheté ces beignets d’arachide, j’ignorerais encore aujourd’hui que j’ai eu un oncle qui écrivait des poèmes. Le poème lui-même serait peut-être tombé dans des mains insouciantes qui l’auraient détruit. Depuis j’ai fouillé tout ce que j’ai pu avoir de lui, (livres) à la recherche d’autres textes. Nada !
Je vécus cela bizarrement, partagé entre l’impression que c’était un signe du ciel et la conviction cartésienne qu’il n’y avait pas matière à s’interroger outre mesure. Je retournai supplier la revendeuse de me remettre le reste des feuilles. Il se trouve que c’était un journal du lycée Sokodé des années 70 que tenaient les élèves. Le reste était sans intérêt, pour moi évidemment, et je lui retournai le journal. Pendant longtemps j’ai gardé jalousement cette page avec le poème de mon oncle comme un talisman reliquaire. De peur de perdre la feuille, je l’ai recopié dans mon premier recueil de poèmes et dans plusieurs autres cahiers. Je voudrais ici lui donner une vie électronique, avec la prière qu’il échappera aux mites et à l’oubli.
Voici le poème :

Quand on est triste

Quand on est triste, mon ami,
Quand on est triste,
On n’est plus soi-même
On se sent la proie préférée du jour.
On accuse le soleil de mal levé
Ses rayons, des flèches empoisonnées.

Quand on est triste, mon ami,
Quand on est triste,
Tout le monde est triste
Le soleil n’approche plus le zénith
L’angélus perd sa belle voix habituelle
On ne sait plus rire

Quand on est triste, mon ami,
Quand on est triste
La nuit n’enlève plus les soucis du jour
On a peur d’elle,
Elle devient la maison hantée
On se couche, l’œil ouvert
L’âme solitaire errant
On ne sait où ;
Jusqu’aux tristes premières lueurs
D’une autre triste aube
D’un autre triste jour.

Quand on est triste, mon ami,
Quand on est triste,
Tout est Tristesse autour de soi.

samedi 2 mai 2009

Frichtiti de fricassées

Au début un rot
deux
une retournée d’estomac
des vomissures
la terre a vomi
le soleil est passé comme ça
sur nos amuseries
moisson de membres
vendange de sang
dans les rues
nos bouches
glanage d’amour
de rire
de joie
une sébile à peine
un coup de talon
dans le sillon
pour tout enfouir
une semence de corps
trophées célébrés
sous des cierges
sur les ravins des joues
salées
sur les cratères des bouches douloureuses
ouvertes
flot de champagne
sur frichti de fricassées
tandis que la morve
rompt les digues
sur la terre constipée de sang
et puis glamour de rhétorique
vive le président
que vive le président
Le soleil
a fermé les yeux
il ferme les yeux
sur nos ripailles
sur fond de boucherie.

Supplice de Tantale au Kenya: les hommes ont intérêt à réformer vite!


Au Kenya, les femmes ont décidé de se mettre en grève, et pas n'importe quelle grève, pour dit-on, "convaincre les deux hommes d'agir contre la pauvreté plutôt que de se quereller." Les médias n'ont pas tu l'information. Il faut dire que lorsque les femmes s'y mettent, elles poussent le bouchon jusqu'à une extrémité insoupçonnée. A cause de la lamentable guéguerre ,chicanerie égoïste entre le président Mwai Kibaki et son premier ministre Raila Odinga, les femmes ont décidé de "fermer le robinet". Les hommes ne pourront retourner à leurs femmes que s'ils se décident à réfléchir pour l'intérêt de la population.
Ce projet est louable.
Mais que va-t-il se passer dans les chambres, entre le mari et son épouse qui l'adore au point de ne rien lui refuser, son corps encore moins ; entre le concubin et sa concubine qui s'offrent le plaisir de la chair pour démontrer qu'ils s'aiment; entre la travailleuse de sexe qui a des retards de loyer et son client; entre la nymphomane qui n'a que faire de ces réformes et le mec qu'elle a rencontré pour un soir? Elles sont prêtes les femmes au Kenya pour payer les femmes de joie afin qu'elles suivent le mouvement de grève. Difficile à dire.
Comme le disait ma mère, elle le disait bien, si les femmes ne portaient pas de grossesses, elles jureraient toute leur vie qu'elles sont vierges.
Mais ne nous égarons pas sur ces faiblesses particulières. Pendant une semaine, ils vont souffrir le supplice de Tantale: se pencher pour s'abreuver de ces femmes qui vont s'assécher, tendre la main pour toucher à ces fruits sur ces poitrines offertes qui vont reculer, avec l'angoisse sur la tête de devenir pédé, si après une semaine, les femmes devaient remettre ça.
Les hommes ont intérêt à vite se dépêcher s'ils ne veulent pas au bout d'une semaine, commencer par se rentrer dedans. Pour l'instant, ils regarderont ces femmes déambuler les envies en crue et ne pouvoir rien faire sinon, serrer les couilles sir fort pour les faire taire.